24 mars
Voilà, je
suis inscrite chez Instinct Canin, il paraît qu’au bout de quelques séances je ne
ferai plus de bêtises et je saurai marcher intelligemment, toujours du côté
gauche ; ça, c’est pas gagné, faites-moi confiance. C’est trop amusant de
s’enrouler avec sa laisse autour de leurs jambes et de les empêcher d’avancer,
c’est pas l’autre malin avec ses leçons à la noix qui va me priver de ce
plaisir !
Aujourd’hui samedi grande première nalienne : j’ai fait ma rentrée ce matin à l’école des chiots, chez Daniel l’éducateur canin. Il y avait un superbe husky noir et blanc qui a tout de suite été mon copain malgré ses yeux en amande et sa gueule pointue de loup. Minne et Jean ont eu le même autrefois, un Alaska qu’ils adoraient, c’est peut-être pour ça que celui-ci m’a plu tout de suite. Un fox marron, plus petit que moi, est tombé amoureux dès qu’il m’a vue : il est monté sur mon dos en frétillant de l’arrière-train ! Il sait, ce rustre, que c’est mal ? Il paraît que je suis encore un bébé !
C'est
dimanche : première vraie balade à la mer avec Jean et Minne. Il
faisait un grand vent qui soulevait des flocons de mousse, au début j’ai cru
que c’étaient des papillons, j’en ai attrapé un, pas fameux. La mer poussait
ses vagues de plus en plus loin sur le sable, nos huit pattes ont été
rattrapées alors que nous marchions tranquilles au bord des festons blancs,
« ne lèche pas Nala, c’est de l’écume. » Je goûte quand même, je
goûte à tout de toute façon, je veux connaître toutes les saveurs, même celles
que mes maîtres détestent (par exemple les fientes de poule). C’est salé, ça
donne soif, c’est plein de grains de sable qui piquent la langue, ça me fait
cracher… merci je n’y goûterai plus, Minne avait raison (ça arrive).
Tout ce
que peut atteindre ma truffe c’est pour jouer et me faire les dents :
pieds de chaises, coussins, câbles, joints, serpillères, manches à
balai, bûchettes, récipients en plastique, et encore je connais pas tout,
il y a sûrement des matériaux que j’ai pas expérimentés… Ah ! j’allais oublier
le papier, y en a partout ici. Mais je ne m’intéresse qu’à celui qu’on met dans
la grande corbeille, celui qui ne sert plus qu’à allumer le feu. Je vis ici au
milieu des livres et ça je respecte, c’est sacré les livres, j’ai compris dès
le premier jour qu’il ne fallait pas y toucher. Ils ont l’air de bien les
aimer, Minne et Jean, tous ces livres, ils mettent le nez dedans tous les
soirs et ils peuvent rester très longtemps sans se parler, alors que Minne
a toujours un truc à lui raconter d’habitude. Regardez Jean en train de lire,
il a oublié que j'existe, c’est vexant... J'aimerais bien apprendre à lire moi
aussi.
Minne et
Jean ont des poules : il y a du bon et du mauvais dans la poule : le bon c'est
qu'elles pondent des œufs délicieux, on me donne un petit bout d'omelette
parfois ; le mauvais est qu'elles ont une partie du jardin pour elles seules,
interdit d'y aller pour jouer à les poursuivre. Il y en a une, la plus grosse,
toute noire à reflets bleus, qui n’a pas peur de moi, qui franchit la
barrière et s’approche sur ses grandes pattes jaunes ; je lui ferais bien sa
fête à cette péronnelle à crête ridicule, mais elle a aussi un bec puissant,
j’ai pas envie qu’elle me crève un œil. Regardez-moi cette arrogance, mais pour
qui elle se prend ?
3 avril
C'était
dimanche, matin de Pâques, chez la grand-mère : j'ai vu dans le
parc une drôle de bête qui m'a fait un peu peur au premier abord. Je
m’approche, à demi-rassurée, elle vient me flairer... puis comme je lui
plais elle fait trois cabrioles et m’entraîne dans une course folle tout autour
de la maison ; elle a des pattes démesurées, elle est obligée de m’attendre
pour que je continue à la poursuivre, c’est aussi amusant qu’au club canin mais
avec un seul chien pour moi toute seule ; elle s’appelle Mara, j’ai joué
souvent avec elle pendant ces trois jours, elle doit bien me regretter
maintenant que je suis rentrée chez moi. Moi j’aime bien qu’on me regrette…
Minne fait des plats qui sentent trop bon mais je n’ai pas le droit d’y
toucher, tout ça c’est pour elle et Jean, leur vétérinaire le leur a pas
interdit à eux, ils mangent toujours des choses que j’aime (mais j’aime
tout, même les endives cuites, même l'ail du tourin, même les
fraises…). Quand elle apporte le plat sur la table j’ai du mal à
résister, je mets deux pattes sur le bord et je regarde et je renifle
même si l’on me gronde. J’ai tellement grandi que j’arrive maintenant à
voir tout ce qu’ils mettent sur la table, il leur en faut des trucs pour
un seul repas ! Pourquoi j’ai pas un couvert moi aussi, puisqu’il
paraît que je suis de la maison ?
20 avril
Comme
je fais des progrès tous les jours on m’emmène en Italie, c’est sûr
maintenant, d’ailleurs j’apprends l’italien le soir avec Jean, il lui
arrive de me parler en italien pour que je m’habitue. On a acheté un
filet pour la voiture, je pourrai plus mettre mes deux pattes sur la
boîte à gants comme j’aime pour regarder le paysage et surtout être
entre eux deux et leur dire des choses humides à l’oreille. Mais le
moins drôle est qu’il faut m’acheter une muselière pour aller sur le
vaporetto à Venise…
Je m’en serais bien passée, mais si je veux voir les pigeons de Saint-Marc il n’y a pas d’autre solution, c’est obligatoire il paraît. Comment on fait pour aboyer quand on a le museau dans une muselière ? Ça c’est le côté pas drôle de l’Italie… Je vous raconterai, Minne a dit qu’elle allait tenir mon journal au jour le jour...
Je m’en serais bien passée, mais si je veux voir les pigeons de Saint-Marc il n’y a pas d’autre solution, c’est obligatoire il paraît. Comment on fait pour aboyer quand on a le museau dans une muselière ? Ça c’est le côté pas drôle de l’Italie… Je vous raconterai, Minne a dit qu’elle allait tenir mon journal au jour le jour...
27 avril
Mais
avant de partir en Italie nous sommes revenues en Périgord ; Minne a
visité plein de maisons et je me suis un peu ennuyée dans la voiture ; à
un endroit pourtant nous avons été accueillies bruyamment par une
douzaine de gros chiens à crinière de lion, des roux, des gris, des
noirs, alignés contre leur clôture, chez le voisin ; Minne a dit « oh !
les jolis chow-chows , ils seront nos gardiens si nous achetons ici »
(et moi alors, à quoi je servirai ? Elle est vexante parfois…). Moi
j'aime bien les gros chiens, ils savent mieux jouer que les petits. En
rentrant de la plage l'autre soir on en a trouvé toute une grappe qui
poussaient des aboiements d'oiseaux ; que j'aimerais pas être un petit
chien ! Il n'y a pas de risque, il paraît que je vais grandir encore.
Vis ma vie d'aventurière, qu'elle dit !!
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